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Avr 27

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Chronique d’une hospitalisation ordinaire en service public

hopital17 heures un dimanche soir, j’effectue mon entrée dans un service d’un hôpital de l’AP-HP. L’intervention chirurgicale doit se dérouler le lendemain.

Cette opération d’une durée de 2H30 est programmée depuis près de deux mois.

Devant mon étonnement au regard du peu de patients hospitalisés, l’infirmière me répond qu’ « en raison des vacances scolaires, des lits sont fermés ».

Peut-on faire le lien entre cette information et le tract affiché au poste de soins dénonçant le manque de personnel ?

Lundi 7h00 : «  Vous passez au bloc à 11heures, vite la douche et on vient vient vous pré-médiquer. »

Les heures s’étirent donnant tout leur sens au terme de patiente.

12H :« Votre intervention est décalée à 13h, je viens vous pré-médiquer. Vous êtes bien à jeun? ».

Non, j’ai cru que vous m’aviez oubliée. Je me suis fait une ventrée de chocolat !

Tout semble s’accélérer et être imminent.

« Arrêtez de faire de la gymnastique et allongez vous sur le lit ! »

En guise de gymnastique, je tricote dans un fauteuil.

13H : Un brancardier m’embarque « pour le bloc ».

À cet étage, il fait un froid de canard mais, rassurant, ce monsieur m’affirme qu’au bloc j’aurai une couverture. Vivement le bloc !

J’attends dans un couloir, l’effet des petites gougouttes de prémédication s’estompe, tandis qu’ arrivent cinq autres « patients ».

Une vraie cour des miracles avec nos différentes pathologies : mon voisin immédiat réclame d’aller aux toilettes, on lui confie un pistolet.

C’est un vieux monsieur tout tremblant, très très âgé. Pourvu qu’il vise bien !

Mon autre voisin reçoit dans ce même couloir la visite de son chirurgien et commence alors en public une véritable consultation.

Moi qui n’ai jamais regardé Docteur House je suis servie !

Bien que serrez comme des sardines, cette promiscuité n’arrive pas à me tenir chaud.

15H : Enfin le bloc, toute l’équipe est là rassurante. Je vois la chirurgienne qui semble désolée et s’approchant de moi :

«  Excusez- nous, vous auriez dû passer avant, mais nous attendions la boîte. »

Avant de sombrer je lui demande de quelle boîte il s’agit. Je l’entends me répondre découragée, accablée : « La boîte avec les instruments de chirurgie, tout simplement. »

Black out. Retour à 21 heures dans la chambre.

Mardi 8H3O Visite au pas de course de l’interne et de l’infirmière.

« Bonjour,tout va bien ? Vous n’avez pas mal ? Vous sortez demain. »

Pas le temps de répondre que la douleur est insupportable, que je n’arrive pas à m’asseoir, que marcher quelques pas constitue une épreuve…et que sortir 36heures après cette intervention est inconcevable !

14H Une infirmière passe pour la surveillance et j’en profite pour la convaincre que mon état ne me permet pas de sortir le lendemain. Elle se montre compréhensive et semble me donner des arguments : tension dans les chaussettes (8-6) et redon (drain) qui se remplit. Cependant elle m’affirme que cela ne dépend pas d’elle.

18H Passage toujours au pas de course de l’interne et de l’infirmière compréhensive.

« Bonsoir. Tout va bien ? Vous sortez demain. »

Étrange cela me rappelle quelque chose mais quoi ?

En fait le médecin s’attarde exceptionnellement et m’explique que cette sortie précoce est pour mon bien .

-1° « Moins vous êtes à l’hôpital et moins vous avez de chance de contracter une infection nosocomiale. »

Puis, il tente de me faire culpabiliser :

-2° «  Vous savez, cela coûte cher une hospitalisation et je ne suis pas pour en faire payer le prix à la collectivité. »

Cerise sur le gâteau :

« Quand on reste à l’hôpital on a tendance à se laisser aller. »

Que répondre ? C’est ma faute, c’est ma très grande faute !

Excusez moi de coûter cher à la collectivité avec deux cancers en trois ans, 6 mois de chimio, 5 interventions chirurgicales, des IRM,/Scanners/ radios et tutti cuanti !

Je promets à l’avenir d’être une citoyenne responsable : de ne plus être malade …ou de mourir !

Mercredi 8H Sauvée par le redon qui gentiment s’est rempli et a du être changé dans la nuit, l’interne décide d’annuler ma sortie ce jour.

Si j’avais été une bonne citoyenne ne cherchant pas à creuser le trou de la sécurité sociale mais au contraire une réelle partenaire dans cette recherche d’économies, j’aurais demandé à rentrer à mon domicile.

Le médecin fait découper par l’infirmière l’énorme pansement opératoire et me scotche provisoirement un drap en papier sur le corps en m’informant qu’elle ne peut effectuer les soins immédiatement mais reviendra les faire dans 30 minutes.

Le service manquant cruellement de personnel, elle ne reviendra que …1H30 plus tard. Je reste donc bloquée avec mon drap scotché ! Ce scénario se répétera jeudi.

Mon propos n’est évidemment pas de remettre en cause les grandes compétences techniques et humaines des personnels de l’AP-HP.

Il s’agit simplement de s’interroger sur le bien fondé des mesures prises en matière de santé publique, de « gestion » des hôpitaux publics, bref de la qualité des services publics.

Actuellement, les politiciens interviennent dans les médias afin de démontrer la nécessité de développer la chirurgie ambulatoire permettant de participer à l' »effort national ». C’est faire des économies à outrance sur la santé entamant dangereusement la sécurité des patients et personnels.

Est-il nécessaire de rappeler que le malade ne souhaite rien de plus qu’être en bonne santé et chez lui !

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